Hausse persistante des alertes pour maltraitances en établissement

 

COMMUNIQUĒ DE PRESSE
Fédération 3977 contre les maltraitances

 

Paris, le 15 novembre 2021

 

Hausse persistante des alertes pour maltraitances en établissement

La Fédération contre les maltraitances reçoit chaque jour des alertes pour des situations de maltraitances par sa plateforme téléphonique (numéro 3977) ou directement par ses centres.

 

Une nouvelle hausse des situations conduisant à ouvrir un dossier (maltraitances possibles) est constatée ce 3ème trimestre 2021, relativement à la même période en 2020 (+296 soit +22%). Elle fait suite à la forte augmentation déjà constatée au 1er semestre (+ 559 soit + 23%). En outre, les situations rapportées paraissent souvent complexes, et plus difficiles à résoudre.

Cette évolution porte plus particulièrement sur les situations issues des établissements médico-sociaux et de santé (+ 186 soit + 61%) et, dans une moindre mesure, celles dont les victimes vivent à leur domicile (+166 soit + 16%).

Parmi les types de maltraitance dont la hausse est remarquable, figurent les maltraitances financières (+57 soit + 46%) et les maltraitances liées aux soins (+ 43 soit + 63%).

Même si les 3/4 des alertes concernent des victimes âgées, l’augmentation observée pour les personnes en situation de handicap est très préoccupante (+ 144 soit + 50%).

Cette hausse forte et prolongée s’explique en partie par la stagnation des alertes en 2020, par comparaison à 2019, liée notamment aux périodes de confinement. L’évolution récente s’explique sans doute en partie par un « rattrapage » d’alertes qui n’ont pu être lancées auparavant.

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, moins de 5% des situations de maltraitances sont l’objet d’un signalement.
Cette hausse peut donc traduire aussi bien une augmentation réelle des situations de maltraitances, que des pratiques de signalement plus faciles de la part des lanceurs d’alertes. Les deux mécanismes interviennent probablement.

Ce nouveau constat souligne l’urgence de mieux comprendre et réagir aux maltraitances d’origine institutionnelle, souvent en cause dans les établissements.
Il recoupe les difficultés reconnues par ailleurs portant sur les métiers dits « du grand âge » dont le recrutement et la formation ne permettent pas, en l’état, de répondre à l’ensemble des besoins des résidents ou des patients.

Cette situation justifie à la fois des mesures au plan national (reconnaissance de ces métiers, effectifs, rémunération, statut, formation…), et des initiatives de terrain dans chaque établissement, mobilisant le management (recueil, analyse et suivi des situations, prévention).

La Fédération 3977 est prête, pour sa part, à contribuer aux unes et aux autres.

 

Dépôt de plainte pour maltraitance dans un EHPAD de Montélimar

 

Mi septembre 2021, Rance 3 Auvergne – Rhône-Alpes titrait: Drôme: Les drames de la maltraitance passive d’un EHPAD à Montélimar

 

 

Nous en reproduisons ci-dessous des extraits.

6 familles ont porté plainte pour défaut de soins contre le groupe Itinova, gestionnaire de l’EHPAD Sainte-Marthe à Montélimar (Drôme). Selon elles, leurs parents y vivent un quotidien dégradant et parfois dangereux à force de négligence.

« Nos parents sont brusqués, on les force à mettre des couches et ils ne font pas leur toilette tous les jours »

A un premier témoignage anonyme, s’en ajoute près d’une dizaine d’autres, provenant de familles, de personnels, de témoins locaux.

A l’EHPAD Sainte Marthe pourtant, le répondeur téléphonique du groupe promet de traiter les aînés « avec respect et bienveillance ».

Une fille de résidente estime « la situation catastrophique, voire dangereuse ». « Ma mère est régulièrement brusquée, on ne lui fait pas sa toilette, on lui met des protections pour qu’elle se fasse dessus. Ses soins ne sont pas assurés correctement, je trouve ça honteux! » 

Deux jours sans aucun soin 

Ce qui a mis le feu aux poudres, c’est un week-end de l’été au cours duquel aucun soin infirmier n’a été effectué. En clair, pas d’insuline, ni d’anti-coagulant et donc des résidents mis en danger avec des taux de sucre frôlant le coma et des fragilités cardiaques très préoccupantes.

Un épisode qui a décidé six familles à porter plainte auprès du procureur de la République de Valence pour défaut de soins. 

« Il n’y a plus d’infirmière, beaucoup ont démissionné. L’une d’entre elle m’a avoué qu’elle était déçue de quitter son poste mais qu’elle ne pouvait plus rester dans ces conditions » raconte la fille d’un autre résident. « Les infirmières n’ont pas envie d’y aller et les aides-soignantes s’en vont car il y a trop de maltraitance » ajoute une autre proche.

« Je ne peux pas tolérer qu’on dise ferme ta gueule à un de mes parents ! »

Le mot qui revient le plus souvent dans la bouche des familles c’est « maltraitance passive« . « On n’en veut pas aux employés même si certains sont violents dans leurs mots et dans leurs attitudes » selon une autre témoignage. « Je ne peux pas tolérer qu’on dise ferme ta gueule à un de mes parents ! je me demande jusqu’où ça va aller! » 

Ce que dénoncent également unanimement les familles c’est le silence. « On paie entre 2100 et 2500 euros et quand on ose demander le minimum on a peur, ça ne peut plus continuer. On est déçus ». « On se sent trahis.

Réponse de la direction 

La direction de l’établissement affirme qu’elle « prend toute la mesure de la situation et met tout en oeuvre pour y remédier dans une volonté de renouer le dialogue sans minimiser les problématiques rencontrées. Un directeur par intérim est arrivé récemment en l’absence de la directrice en poste. Le recours à une direction de transition permet de maintenir un interlocuteur de proximité auprès des résidents, des familles et des salariés. »

« l’ordre des Infirmiers de la Drôme a été contacté afin d’intervenir au sein de l’établissement ». 

Selon certains, ces derniers jours, il manquait à nouveau un infirmier et nombre de familles craignent que cela se reproduise. « On joue à la roulette russe » estime une femme qui se dit épuisée par la situation.

 

La maltraitance passive se dit peu et se voit encore moins.

Ces témoignages reflètent un problème structurel: celui d’une fin de vie qu’on ne voit pas derrière des murs où le silence n’est brisé qu’en cas d’urgence.

 

Une maltraitance institutionnelle en France ? 

La France est l’un des pays européens qui compte la proportion la plus élevée de personnes âgées en EHPAD : 8,8 % des 75 ans et plus.

Claire Hédon, la Défenseure des droits a pointé dans un rapport de 2021 une « maltraitance institutionnelle ».

La maltraitance, avait-elle précisé, « peut être qualifiée d’institutionnelle chaque fois que l’institution laisse les faits perdurer sans réagir après de multiples signalements des familles des victimes » ou qu’elle résulte « du manque de moyens de l’établissement ».

 

Toute personne qui a connaissance d’une situation de maltraitance doit la dénoncer, ne pas le faire est puni par la loi.

 

 

Dromalma 29/09/2021